En attendant le Déluge

En attendant le Déluge

Gouverner la France: résumé de 73 ans !

 

   Gouverner la France depuis 1946: tel est l'intitulé du chapitre d'histoire de terminale. De 46 à 58, sont exposés voire expliqués (brièvement) les "défis" de la IVe République: reconstruire le pays, renforcer l'Etat, réorganiser la société; le droit de vote accordé aux femmes, loin d'adoucir les moeurs politiques, en accentue l'affrontement sur un mode viril, machiste, martial et patriarcal. Gaullistes et communistes rivalisent de rodomontades voire de fantasmes; mais les citoyens ordinaires, soucieux de réalités pratiques, accordent leurs suffrages aux "modérés" qui les rassurent. On peut dire que la IVe République est dirigée par des "messieurs tranquilles", bien élevés, bourgeois, très instruits, et charmeurs à l'occasion. Les manuels citent parfois comme exemple Pierre Mendès France: bachelier à 15 ans, député à 25, il est l'un des tout premiers hommes politiques à s'intéresser de près aux questions financières, chef du gouvernement en 1954 il s'efforce de résoudre la guerre d'Indochine en estimant ce qu'elle coûte et ce qu'elle rapporte; à droite, on l'accuse de "brader" l'empire colonial français, et à l'extrême-droite le jeune député Jean Marie Le Pen lui trouve un visage antipathique, c'est à dire un air juif.

   Aux messieurs trop tranquilles de la IVe succède un chef autoritaire qui veut "dynamiser" la France: le général de Gaulle est un progressiste conservateur favorable aux centrales nucléaires, aux autoroutes, mais aussi à certaines "valeurs": la famille, la religion, la discipline. Sous sa présidence (58-69) l'Etat renforce son rôle de décideur, de planificateur, de gestionnaire et de censeur; mais tout le monde ne suit pas et n'accepte pas la cadence (infernale ?); le progressisme gaullien (le système) et gaulliste (l'idéologie) se heurte à des blocages physiologiques: paresse, ennui, fatigue, désirs d'évasion, besoin de tranquillité...  Le développement des études, des loisirs et des sports, n'incite pas au travail disciplinaire en milieu fermé (usines, bureaux, écoles...) -  Quant au grand air des espaces ruraux, il subit les assauts du productivisme agricole chimique et de l'extension pavillonnaire des grandes villes. Les Français regardent Dallas à la télé pendant que disparaissent leurs villages et que se vident leurs campagnes. Mitterrand est élu comme "force tranquille" (on retrouve l'idée des messieurs tranquilles de la IVe République dont il a fait partie) devant une image de clocher, il promet la décentralisation et la démocratisation de l'Etat; au bout de deux septennats de présidence, ce sont plutôt les délocalisations et le chômage qui se sont imposés.

    Le système étatico-capitaliste mondialisé parvient tout de même à maintenir son emprise sur la population par divers moyens techniques, financiers, et beaucoup de démagogie "progressiste"; il est vrai que la docilité des nouvelles générations (celles du "baby boom") peut s'expliquer par un niveau de confort et de sécurité que les Français d'avant guerre n'auraient même pas pu imaginer. Les inquiétudes et les rigueurs d'autrefois ont cédé la place à des angoisses modernes ou post-modernes; est-ce l'effet d'une instruction plus variée et plus ouverte qui donne aux individus des espoirs difficiles à satisfaire ? et ce faisant une certaine désespérance ? On dit aussi que la démocratisation égalitaire promise et affichée par les gouvernements, de gauche comme de droite, aboutit à des résultats contraires, à une société française de plus en plus segmentée, morcelée, éparpillée façon puzzle... La faute au "manque de moyens" entre les mains de l'Etat, selon les uns, la faute aux individus eux-mêmes, à leur manque de courage, de travail, de volonté, de talent, selon les autres.... Vaste débat.

    Gouverner la France pose question, plus que jamais; le chef de l'Etat est-il encore le vrai décideur ? ou un simple gestionnaire de débats ? Que veulent les Français ? leurs aspirations souvent contraires sont-elles encore conciliables au sein d'un même système politique ? La perspective souhaitable est-elle vers un gouvernement toujours plus autoritaire ? ou qui au contraire laisserait le "peuple" se gouverner par lui-même ?

    Qui vivra verra !                                                                             

 



24/11/2019
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