En attendant le Déluge

En attendant le Déluge

Un peu de politique

 

  Oui, un peu de politique, mais pas trop; des milliers de pages ont déjà été écrites sur le mouvement des gilets jaunes; comment résumer l'affaire ? qu'en penser ? s'agit-il d'un sursaut voire d'une renaissance du peuple ? ou n'est-ce pas plutôt un râle d'agonie nationale, sociale, les relents de la "France moisie" ?

 

    L'affaire se résume ainsi: des centaines de milliers de Français, revêtus de gilets jaunes, qui d'ordinaire sont des gilets de sécurité qu'on porte sur les chantiers ou en faisant du vélo, se rassemblent aux ronds-points des zones urbaines périphériques, devant des supermarchés, sur des gares de péages d'autoroutes, ou bien dans les centres villes, sur les Champs Elysées par exemple. Tous ces Français manifestent leur mécontentement de la politique du jeune président Macron: ras-le-bol fiscal, dénonciation des inégalités creusées par le capitalisme libéral et étatique, critique massive de l'oligarchie dirigeante, qu'elle soit privée ou publique, parfois les deux ensemble, critique sélective enfin des médias, jugés trop proches du pouvoir, et donc éloignés des gilets jaunes et des soucis réels du peuple.

 

   L'affaire divise l'opinion publique: le mouvement fut d'abord regardé avec méfiance par les médias et les Français qui n'y participaient pas, autant dire 95 % de la population du pays; puis il y eut, début décembre, un petit frémissement de sympathie et de compréhension dans l'opinion publique; les journaux régionaux, par exemple le quotidien Ouest-France, consacrèrent des reportages et donnèrent la parole aux gilets jaunes. Mais les épisodes parisiens des Champs Elysées entre la mi décembre et le début de l'année actuelle, épisodes d'affrontements, de violences et de dégats, abondamment relayés par les chaînes de télé, détournèrent une majorité de Français du mouvement; chez les professeurs de mon lycée, par exemple, les opinions opposées voire très hostiles aux gilets jaunes se firent plus nettement entendre.

 

   La pensée est difficile et délicate quand les opinions s'emballent et que les conversations s'enveniment; quelques questions peuvent être posées afin de tempérer les avis impromptus: le mouvement des gilets jaunes est-il exagéré ou minimisé par les médias ? Est-il cohérent ? homogène ? Ou au contraire désorganisé, confus, "inutile et incertain" ? A-t-il fragilisé Macron  ? Ou lui a t-il plutôt permis de sortir de son confort autocratique et de montrer son énergie de démocrate en passant plus de six heures au milieu d'une assemblée de maires et d'élus locaux de Normandie ? Les gilets jaunes, enfin, sonnent-ils le réveil populaire et social de la France ? ou l'extinction d'une certaine "culture" nationale, en partie composée de personnes retraitées, âgées, modestes, tranquilles, prudentes, inquiètes ?

 

   L'avenir donnera des réponses; je tends à pencher vers la deuxième hypothèse, la plus triste, sans doute, mais celle qui traduit, mieux que la première, ce que je pense en définitive de mon pays; à savoir que ce pays est le théâtre d'une lutte permanente et parfois terrible entre la nation et l'Etat, entre les forces productives et travailleuses de cette nation et ceux qui au sommet et sur les marges de l'Etat en détournent l'effort et en sapent le moral. L'histoire moderne (depuis le XIXe) montre comment cette lutte permanente a parfois dégénéré: en guerres, à l'intérieur, entre Français, mais surtout contre des adversaires étrangers que les dirigeants de l'Etat n'ont pas su dissuader et encore moins repousser.

 

   Bref, la politique de ce pays n'a jamais été bien favorable à son peuple; cette idée me désespère un peu; et c'est pourquoi je ne souhaite pas m'étendre sur ce lit de souffrance. Un peu de politique, donc, mais pas trop. Un autre lit m'attend.                                        

 



28/01/2019
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