En visitant la France - 1
Voici quelques observations et réflexions itinérantes glanées au cours d'une semaine de vacances passée entre Caen et le bassin d'Arcachon.
D'abord, très beau temps, ensoleillé et sec. Idéal pour voyager.
Entre Caen et Rennes, le long de l'A.84 (gratuite), paysages verdoyants, humides, agricoles, plus ou moins bocagers; quelques collines, surmontées d'éoliennes, mais un espace plutôt plat adapté aux cultures fourragères; côté ville, signalons Avranches d'où l'on voit le Mont Saint Michel. Entrée en Bretagne "orientale": paysages plus austères, plus sombres, ponctués de gros troupeaux de vaches laitières (race Holstein); l'autoroute passe à côté de Fougères, petite cité granitique, fortifiée, et romantique dans une certaine mesure (Chateaubriand, Hugo et Balzac en ont vaguement parlé); elle passe aussi à 25 km à l'ouest de Vitré, rivale touristique de Fougères (les deux petites villes ont un peu les mêmes atouts: châteaux, rues médiévales, parcs et promenades, crèperies, jardineries, etc.). Mais voici Rennes, la grande ville, capitale de la Bretagne, pôle universitaire et de haute technologie, où j'ai moi-même étudié, sans être devenu pour autant un individu hautement technologique; en direction de Nantes, la rocade fait passer par le sud, ses grands ensembles d'immeubles et la zone industrielle et commerciale de Chantepie où se trouve l'entreprise Ouest-France, premier tirage de la presse quotidienne régionale.
Entre Rennes et Nantes, pas d'autoroute, mais une bonne vieille Nationale à 4 voies, limitée à 110. On traverse le sud de l'Ille et Vilaine, plus austère encore que le nord, et de mentalité plus fruste (1); cela se ressent même aux paysages, qui laissent voir négligence, désolation, abandon, tôles rouillées, etc. Déprimant et inquiétant. On passe à côté de la zone forestière de Notre Dame des Landes, elle aussi sinistrée et oubliée depuis la fin du projet de l'aéroport; mais voici l'aire urbaine et métropolitaine de Nantes qui n'en finit pas d'aspirer les "forces vives" (ce qu'il en reste) des environs, provoquant par conséquent le dépeuplement des zones rurales intérieures, bien que celui-ci s'explique aussi pour d'autres raisons. Plus vaste et plus peuplée que celle de Rennes, l'aire urbaine nantaise présente de multiples visages, économiques, sociaux, culturels et historiques (différentes époques de construction et d'architecture); mais cette "diversité" n'est pas forcément synonyme de mélange, de mixité, de "vivre-ensemble", ou de "cosmopolitisme"; c'est plutôt le contraire que révèlent certains faits divers: isolement, indivualisme, communautarisme, ségrégation, insécurité. Bien sûr, en plein centre-ville, le dimanche après-midi, on peut apprécier une ambiance paisible, récréative, familiale, voire multi-culturelle et laïque; mais ceci n'empêche pas cela; je dirais même que ceci est complémentaire de cela. Entre vices et vertus, publics, privés, entre quiétude et inquiétude sociales, la population française tente de s'équilibrer; un équilibre délicat, fragile et sans doute incertain, car difficile à mesurer.
(1): si je me permets ce jugement qui peut sembler abrupt, c'est que je connais assez bien ce département, où j'ai vécu jusqu'à 23 ans, et où j'ai encore de nombreuses attaches.
Le sud du pays nantais est ravissant, autour de Clisson, charmante petite cité de style italien (charme perturbé chaque année par un déplorable festival de musique bruyante); la végétation change, on aperçoit les premiers pins parasol, et les toits des maisons se couvrent de tuiles; on entre en Vendée, département longtemps jugé réactionnaire par le pouvoir central parisien; mais la soi-disant réaction s'est avérée compétitive et attractive sur le plan économique; la Vendée est devenue riche et peuplée, y compris dans ses zones rurales ou semi-rurales (la limite ou la différence entre "rural" et "urbain" n'est pas toujours facile à définir; seuls des géographes ou sociologues bornés et doctrinaires sont aujourd'hui capables de la fixer, autoritairement. Personnellement, et modestement, je suis favorable à une approche modulable et délibérative des choses...) - On circule lentement, d'abord en raison de la limitation de la vitesse à 80 km/h, ensuite parce que les poids lourds sont très nombreux à emprunter les routes secondaires; on peut le déplorer, mais c'est le prix à payer du dynamisme économique de ce département. Là aussi, question d'équilibre, entre la "qualité de vie" et la nécessité de gagner un peu d'argent; les "libéraux" vendéens diront qu'en gagnant beaucoup d'argent, toujours plus d'argent, on peut s'offrir une meilleure qualité de vie. Les anti-libéraux pensent le contraire; c'est un débat sans fin.
Les départements de la Charente ont eux aussi la réputation d'un certain conservatisme, moins catholique et plus "franc-maçon" qu'en Vendée; nous avons réservé pour deux jours une maison entre Rochefort et Saintes; Victorine est ravie du caractère traditionnel de l'endroit, son petit poêle à bois, sa table épaisse, ses larges bancs, son vaisselier massif, et sa chambre à l'étage qui respire une sorte d'ambiance "notariale", avec sa table de bureau munie d'un sous-main et d'un porte-buvard; cela donne presque envie de prendre une feuille et d'écrire ses impressions d'un côté et ses dépenses de l'autre...
A suivre....
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