En attendant le Déluge

En attendant le Déluge

Mercredi

 

    Depuis plusieurs années je ne travaille pas le mercredi; c'est une demande que je formule sur ma fiche de voeux; elle a toujours été exaucée; en général les mercredis libres sont accordés aux femmes mariées avec enfants; je suis un homme célibataire sans enfant; et j'en déduis que mon cas est exceptionnel; jusqu'ici l'administration du lycée m'a toujours bien traité; l'administration supérieure centrale aussi; personnellement je n'ai aucune raison de me plaindre de l'Etat, qui me paye. Si je suis critique à son endroit, c'est en adoptant un point de vue historique, et géographique; j'aurai l'occasion d'en reparler.

 

   Aujourd'hui je parlerai de mon mercredi, le 30 janvier pour être précis; il convient d'être précis en cette époque de confusion et de désinformation. Mon collègue agrégé d'histoire a déclaré hier devant une assemblée d'élèves que la Russie est "une puissance nocive"; je lui ai demandé ensuite de justifier cette assertion, lui montrant nettement ma désapprobation; il m'a sorti des arguments absurdes, que la Russie perdait des habitants depuis plusieurs années, que son économie intérieure était "pourrie", et que Poutine par conséquent cherchait des compensations extérieures. Le dernier numéro de la revue pédagogique La Documentation photographique, consacré justement au renouveau de la puissance russe, présente la situation, intérieure et extérieure, sous des arguments autrement plus pondérés et documentés.

 

    Mais ce n'est pas le sujet de cet article; j'ai dit que je parlerai de mon mercredi; en cette époque de fébrilité psychologique exacerbée il convient de montrer un peu de fermeté et de force logique. On dit une chose, on s'y tient. Je me suis levé vers 9 heures; Victorine aussi. Le petit chat Ovni a tout de suite réclamé ses croquettes; il faut le modérer car c'est un chat goulu; nous respectons les doses indiquées sur le paquet; un paquet "ultima light" qui plus est ! J'imagine que c'est une supercherie commerciale comme la plupart des produits de ce genre qu'on trouve en grande surface; nous vivons dans un monde de "fake", où tout est transformé, recyclé, imité, conditionné et reconditionné. Difficile de concevoir en ce monde "artificiel" une vérité qui serait "pure"; une vérité qui serait blanche et vierge; intouchable, sacrée.

 

   Sans transition: Victorine est sortie du lit juste avant moi; les autres jours de la semaine c'est l'inverse; j'aime préparer le café, même si je n'en bois pas le matin; longtemps célibataire et solitaire je découvre la volupté (morale) de rendre service, de me montrer agréable et utile; les petites actions du matin permettent aussi de réchauffer doucement un organisme qui vient de passer une nuit au ralenti; elles permettent aussi de vérifier la précision des gestes et la dextérité des mains; j'ai l'impression ainsi d'être un sportif de haut niveau qui s'apprête à une course; quelles sont les conditions météo ?

 

    Il fait froid et il pleut; deux degrés de moins et ce serait de la neige; mais en Normandie littorale les chutes de neige sont très rares; Victorine part au boulot en se plaignant d'un début de mal de tête. Je ne connais pas et n'ai jamais connu ce désagrément; un facteur important, je crois, de la vie à deux est d'accepter les problèmes de santé de l'autre; en notre époque de drogues et de dopage il convient aussi de chercher à y remédier par des méthodes douces. Est-ce être réac que de se méfier de certains médicaments et de certains traitements "lourds" ? Beaucoup de médecins utilisent hélas cette accusation pour continuer à prescrire des produits chimiques et toxiques. Dans le milieu paysan, dont je suis issu, la méfiance à l'égard des médecins et de leurs vaccinations a persisté jusqu'à une époque très récente. Mais les paysans en question, d'un autre côté, n'avaient pas d'alternative à proposer, ayant perdu le savoir-faire thérapeutique de leurs ancêtres; ils avaient juste retenu pour soigner les états fiévreux la seule solution du "grog" avec de la "gnôle" avant d'aller au lit.

 

   Plutôt lucide et reposé, je vais au supermarché Cora faire quelques courses et me "regonfler", car le pneu avant-droit de ma voiture, côté conducteur, se dégonfle régulièrement; j'en ignore la cause; je préfère envisager la conséquence: changer de voiture ! Une collègue d'espagnol nous a vanté l'autre soir (et un peu gonflés) son achat d'une voiture électrique, fustigeant au passage les "grosses BM" polluantes des "gilets jaunes"; elle a estimé qu'il fallait taxer davantage ces abrutis, ces beaufs, ces rustres, ces mangeurs de pizzas surgelées, etc. Cette petite séquence de "boboïsme" exalté et intransigeant, en faveur d'une consommation locale de produits frais, ne m'a pas empêché, quatre jours plus tard, d'acheter un ananas d'Equateur au supermarché Cora de Rots. J'ai aussi acheté un rôti de veau dont je n'ai pas vérifié l'origine; et je suis rentré à la maison au volant de ma voiture Renault Laguna très polluante (elle date de 1998 !); mais regonflée !

                          

 

                      

 



30/01/2019
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