En attendant le Déluge

En attendant le Déluge

En visitant la France - 2

 

    Deux jours seulement ? Le propriétaire de la maison que nous avons louée est du genre bavard et ne tarit pas d'éloges sur les curiosités et découvertes touristiques du département de la Charente maritime; il y en a pour tous les goûts, pour tous les âges, pour tous les revenus; petit aperçu des possibilités de visites, de balades et de dégustations à travers une carte:

 

 

 

    En effet, en effet, c'est un département très séduisant; j'ai souvenir avoir montré à des élèves un film amateur de l'occupation allemande où l'on voyait des soldats de la wehrmacht festoyer en plein air du côté de Saintes ou de Royan; étaient-ils sous-alimentés avant d'entrer en France ? leur appétit fut-il un facteur déterminant de leur motivation et de leurs victoires militaires de 1940 ? Selon Hitler, la race allemande ou aryenne méritait mieux que l'espace relativement ingrat (sur le plan agricole) de la Germanie. Mais laissons de côté ces sombres considérations.     

 

    Nous visitons Rochefort, charmante ville géométrique conçue au XVIIe par l'Etat royal (Louis XIV-Colbert) afin de développer la puissance maritime du pays; c'est de là, je crois, que partit La Fayette sur la frégate L'Hermione en direction de l'Amérique (ainsi que me le rappelle Victorine). On peut visiter la réplique du bateau (qui a effectué en 2014 la traversée de l'Atlantique). Mais la ville a beaucoup d'autres attraits: sa grande place Colbert où a été tourné le film de Jacques Demy Les Demoiselles de Rochefort, sorti sur les grands écrans le 8 mars 1967; une certaine image de l'élégance française; outre les mélomanes nostalgiques, les amateurs d'ensembles homogènes et de belles façades classiques apprécieront cette place; de toute façon, la ville respire l'ordre et le calme; quant à la volupté exotique, il faudra repasser: la maison de Pierre Loti est fermée jusqu'en 2021. Nous visitons le musée de l'hôpital militaire: immense bibliothèque de livres historiques de chirurgie, de médecine, mais aussi de botanique, de zoologie, d'ethnologie, de géographie et de récits de voyages. On peut aussi observer des squelettes, des crânes, des organes en bocaux, des appareils de chirurgie ancienne, et divers objets rapportés de pays lointains. Une jeune guide nous expose tout cela de façon décontractée; il y a pourtant de quoi frémir. L'immense bibliothèque en revanche a quelque chose de rassurant; on aperçoit quelques chercheurs, plutôt âgés, silencieusement plongés dans de vieux ouvrages. Et quels ouvrages ! Autrefois, avant la télévision et tous les divertissements culturels, les gens studieux pouvaient étudier puis écrire des journées entières, à peine interrompus par la faim et la fatigue; je crois qu'ils avaient une concentration d'esprit plus forte que celle des "intellectuels" modernes. Mais leurs livres et leurs noms ont été oubliés. Le "siècle des Lumières" étudié à l'école se résume trop rapidement à quelques notions politiques ou idéologiques (libéralisme, pluralisme, tolérance, droits de l'homme...); quand j'en parle aux élèves (cela m'arrive chaque année, vers les mois de mars-avril) je préfère insister sur l'appétit de savoir et de raisonnement des savants et des lettrés, sur leur capacité critique, non pas tant à faire la "lumière" sur le monde et l'humanité qu'à en souligner les profondeurs cachées, opaques, obscures...

 

   Revenons aux clartés de la Charente; après Rochefort, nous visitons Saintes, petite ville de 25 000 habitants environ, aussi tranquille, réputée pour son arc de triomphe et son amphithéâtre romains; on peut aussi apprécier la basilique Saint Eutrope, endommagée pendant les guerres de religion (beaucoup de protestants dans la région), et l'abbaye aux dames, très bel ensemble restauré dont une partie sert d'hôtel et une autre d'auberge de jeunesse. Tout cela donne envie de rester ici, de se poser sur un banc au bord de la Charente et de respirer la douceur lumineuse de l'environnement. Mais nous avons pris la décision antérieure d'aller vers Bordeaux; comme il fait beau le trajet ne semble pas repoussant; c'est Victorine qui conduit sa voiture. La route traverse la Saintonge, terre fertile de cultures diverses, céréales, vignes, fruits, dégageant une belle impression de paysages agricoles soignés. Le pays de Blaye est en revanche un peu moins chatoyant, dominé par un vignoble massif; on s'approche de l'aire urbaine de Bordeaux; il faut désormais emprunter le grand axe autoroutier; Victorine accuse un peu la fatigue et l'ennui d'avoir à rouler par un aussi beau temps; la circulation devient intense et mes indications d'itinéraire ne sont pas toujours les meilleures.

 

    Le soir tombe quand nous arrivons sur le bassin d'Arcachon; mais la lumière reste suffisante pour admirer et respirer la douceur de l'environnement; très peu de touristes à cette époque de l'année; nous marquons une pause d'une heure à Audenge pour marcher au bord de l'eau en observant les moutons des prés environnants; une brebis vient d'agneler; très vite le petit animal frétille à la mamelle de sa mère. C'est charmant. Aucun charme, en revanche, dans le mobile-home que nous avons loué pour deux nuits à Arès.

 

    La géographie aménagée du bassin d'Arcachon fait figure d'exemple dans de nombreux manuels scolaires: zones protégées, pistes cyclables, forêt entretenue et raisonnablement exploitée, urbanisation contenue et contrôlée, petits villages d'ostréiculteurs avec points de dégustations et de ventes, restaurants tranquilles et chics... Bref, une zone touristique plutôt "bobo" avec quelques campings populaires ouverts l'été. Bien sûr, un peu d'industrie, de nombreux commerces, quelques traces de pollution. Petit croquis de synthèse en dessous:

 

 

 

         

                    

 

 

 

 



26/02/2019
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