En attendant le Déluge

   Les écologistes aiment le vélo (la bicyclette) mais pas forcément le Tour; le spectacle médiatique d'une compétition libérale mondialisée n'est pas leur tasse de thé; d'aucuns estiment qu'elle coûte trop cher (aux contribuables) pour ce qu'elle rapporte (aux commerçants); qui plus est, elle dégrade l'environnement par le passage bruyant et polluant du peloton et de la caravane publicitaire. Face à ces critiques, les organisateurs mettent en place depuis plusieurs années un "protocole" de récupération des déchets (bidons, papiers) laissés par les coureurs et les voitures. Le commentateur et ancien coureur Laurent Jalabert est totalement favorable à ces mesures de propreté, en faisant observer que des amendes et des sanctions frappent les coureurs qui ne les respectent pas; il en déduit: "la répression, c'est ce qui marche le mieux.". 

    Toujours à propos de l'environnement, les images du Tour montrent des cours d'eau à sec, par exemple le Var; le consultant Franck Ferrand, chargé des commentaires "patrimoine", nous explique que le réchauffement n'est pas seul en cause, et la manière dont il le dit pourrait même suggèrer un point de vue légèrement "climato-sceptique"; une autre explication de l'assèchement du Var, d'après ce qu'on lui a dit, ce sont les piscines et les puits qui ont été creusés en grand nombre dans la région azuréenne. La deuxième étape autour de Nice permet d'apprécier de superbes villas qui surplombent la baie des Anges; toujours d'après Franck Ferrand la villa Léopolda (ayant autrefois appartenu au roi des Belges Léopold) est la plus chère du monde: entre 500 et 750 millions d'euros. 

   Le vainqueur de l'étape, le Français Alaphilippe, empoche quant à lui 11 000 euros, qu'il partage avec ses coéquipiers. Il est parvenu à s'extirper du peloton dans la montée du col d'Eze; bien que prévisible, son attaque s'est avérée payante. Les principaux favoris du Tour se sont contentés d'observer sans bouger. Les commentateurs de France TV qui nous annonçaient une étape "de folie"  ont vite été ramenés à la raison. 

   France TV décidément m'embête un peu; j'ai dû moi aussi me rendre à la raison, que le dirigeable flottant au-dessus de Nice n'est en vérité que le décor de l'émission Vélo-Club tournée à Paris; c'est donc un montage visuel, très bien fait, un "trompe-l'oeil", une illusion; j'aurais pourtant bien aimé en savoir plus et j'ai longuement cherché sur internet une explication sur les dessous et les moyens de ce décor; mais sans résultat; le sujet n'intéresse personne; j'ai finalement décidé d'écrire à France TV; faut quand même avoir du temps à perdre ! Bref, par ce décor, l'émission Vélo-Club confirme ce qu'elle est depuis l'origine: du vent !

   Du vent aussi le discours du proviseur sur la rentrée scolaire, le port du masque, etc. Mon collègue de philo me demande si j'ai lu Nietzsche pendant les vacances. Eh bien non. Mais j'ai aperçu hier en regardant l'étape le chemin Frédéric Nietzsche en direction du col d'Eze. Le philosophe allemand un peu malade s'est refait une santé, une "grande santé", pendant son séjour niçois et azuréen au cours des années 1880 (voir lien en bas de l'article). On ne souligne pas assez le rôle de l'environnement, du "cadre de vie", du paysage, sur la créativité et sur la réflexion des artistes et des intellectuels. Pour les peintres, on en tient compte davantage; mais pour les écrivains, les musiciens, et autres artistes, il n'en est jamais tellement question. 

   Le Tour s'éloigne de Nice et de la côte pour pénétrer dans les Alpes provençales (Sisteron); malgré le dénivelé, une rigolade pour les coureurs, l'étape est gagnée par un sprinteur; les organisateurs ont beau vouloir rendre la course dynamique, ce sont les équipes et les coureurs qui décident; et une fois de plus on devrait donc assister à un Tour très contrôlé, très maîtrisé, et sans doute aussi un peu ennuyeux.     

Nietzsche sur la Côte d'Azur